Les démissions en chaîne isolent Angela Merkel

L'Union chrétienne-démocrate (CDU) de la chancelière allemande Angela Merkel a subi vendredi une nouvelle défection de poids, la quatrième de cette année, avec l'annonce par Jürgen Rüttgers, ministre-président sortant du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, qu'il se retirait de la vie politique.

Rüttgers a tiré la leçon du net recul de la CDU aux élections du Land le plus peuplé d'Allemagne, le 9 mai dernier, qui a fait perdre la majorité au Bundesrat, la chambre haute du parlement, à la coalition gouvernementale CDU-CSU-FDP. Après avoir tenté vainement de former une "grande coalition" dans le Land, il a jeté l'éponge, laissant le champ libre à un gouvernement minoritaire formé des sociaux-démocrates (SPD) et des Verts, qui doit encore être ratifié la semaine prochaine par le parlement régional. Son retrait survient après celui de trois autres piliers de la CDU, qui dirigeaient tous trois un autre Land, et qui avaient tous trois des ambitions pour la chancellerie. Dans le Land de Hesse, Roland Koch a décidé de rejoindre le secteur privé. Günther Öttinger a quitté son poste dans le Bade-Würtemberg pour devenir commissaire européen à l'Énergie et Christian Wulff a démissionné en Basse-Saxe pour postuler à la présidence de la République, un poste largement honorifique.

Seule, en première ligne

"Les perdants perdent leurs 'perdants'", résume avec ironie Gero Neugebauer, politologue à l'université libre de Berlin. "Ce fut l'année où les postulants à la chancellerie furent éliminés, l'un après l'autre", dit-il. "À court terme, cela peut être bénéfique pour Merkel, qui n'a plus à se soucier de ses rivaux. Mais à long terme, cela est mauvais pour elle, car elle devra désormais convaincre de plus en plus le parti de la suivre", ajoute le politologue. "Il se pourrait bien, tôt ou tard, que le parti dise : 'On a besoin de quelqu'un d'autre", avance-t-il.

Angela Merkel est désormais seule en première ligne, au moment où sa cote de popularité, comme celle de la CDU et de ses alliés libéraux du FDP, ne cesse de chuter. Selon un récent sondage, seulement 40 % des Allemands sont satisfaits de son action, un plus bas depuis son arrivée à la chancellerie en novembre 2005. Environ 47 % des personnes interrogées se prononcent en outre pour l'organisation d'élections législatives anticipées, alors que l'actuel gouvernement de coalition n'est en place que depuis l'automne dernier. Le prochain scrutin fédéral est prévu normalement à l'automne 2013, mais 55 % des Allemands ne croient pas que l'équipe actuelle tiendra jusque-là. Le gouvernement et son chef pâtissent à la fois de leurs divisions internes et des mesures d'austérité décidées au début du mois et, qui selon les adversaires de Merkel, pourraient mettre en danger la reprise économique.

Le prochain test politique pour la chancelière aura lieu mercredi prochain avec l'élection présidentielle, provoquée par la démission-surprise de Horst Köhler, à la suite d'une polémique née de ses propos sur l'engagement de l'armée allemande dans des missions à l'étranger. Le chef de l'État sera élu au suffrage indirect par l'Assemblée fédérale. Votent les 622 membres du Bundestag, la chambre basse du parlement, et un nombre équivalent de délégués des parlements des Länder. Christian Wulff peut théoriquement compter sur au moins 644 voix sur 1.244, soit 20 de plus que la majorité nécessaire, mais il pourrait être victime de défections en raison de la popularité de son adversaire, le pasteur Joachim Gauck, 70 ans, soutenu par le parti social-démocrate et les Verts. Ce pasteur âgé de 70 ans, qui a dirigé les recherches dans les archives de la Stasi, l'ancienne police politique est-allemande, est le favori de l'opinion publique. Son élection placerait à la tête de l'État une direction bicéphale composée d'un pasteur et d'une fille de pasteur, tous deux orginaires de l'est du pays.

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