Loire : le dirigeant de Sullair Europe séquestré par les salariés

Le dirigeant de la filiale européenne du fabricant américain d'outils pneumatiques Sullair a passé la nuit dans l'usine de Montbrison dans la Loire, retenu par les salariés mécontents de la fermeture annoncée de l'usine. La séquestration d'Yves de Waroquier a commencé mercredi à 18 heures, quelques heures après sa nomination comme cogérant de la filiale de Montbrison jusqu'à sa fermeture par Henry Brooks, le président de Sullair Corporation (groupe United Technologies). Selon Jean-Louis Bourgin, délégué du personnel et représentant CGT, "le mouvement est parti de la base" : les salariés eux-mêmes ont organisé un vote après la réunion du CE. Leur attitude traduit l'exaspération d'attendre depuis plus d'un mois de connaître les conditions exactes de licenciement, fait valoir le syndicaliste.

Le groupe américain a annoncé début janvier son intention de fermer la filiale Europe et son usine de la Loire. Motif invoqué par le constructeur de compresseurs et d'outillage pneumatique américain, la crise qui "l'a sévèrement impacté" à cause de "sa dépendance étroite" au "secteur de la construction et également de l'industrie". Invoquant des surcapacités de production notamment en Europe, il explique dans un communiqué de janvier vouloir "arrêter les activités de Montbrison" pour "sauvegarder sa compétitivité". La production devrait être répartie sur ses autres sites, aux États-Unis, en Chine et chez un sous-traitant roumain.

Dialogue de sourds

Dans le cadre d'un plan social pour l'emploi en négociation, des mesures de formation, d'aide à la mobilité et une prime de départ en plus des indemnités légales sont proposées aux salariés, assure la direction. Mais, selon elle, ceux-ci réclament une seconde prime au titre du "préjudice moral" ce qu'elle refuse, pour l'instant, d'envisager.

Côté salariés, on n'est pas du tout convaincu de l'argumentaire de la direction censé justifier la fermeture de l'usine. "Si le carnet de commandes n'était pas plein, on comprendrait mieux", souligne le représentant CGT Jean-Louis Bourgin. Les salariés affirment avoir mandaté des experts comptables pour faire en sorte que le site ne rencontre pas de difficultés économiques. Ils dénoncent, par ailleurs, l'absence de proposition de la direction notamment sur la prime de départ extra-légale.

Des gardes du corps au CE

Yves de Waroquier est retenu dans les bureaux de l'entreprise, mais peut se restaurer, assure Jean-Louis Bourgin. Après le CE de mercredi, les salariés ont laissé repartir Henry Brooks et sa directrice des ressources humaines. Le délégué syndical fait état d'une "ambiance forcément tendue" lors de cette rencontre, la direction américaine ayant "pris les devants en venant avec trois gardes du corps"...

Depuis, le dirigeant américain, qui parle très peu français selon la direction, n'a plus de contact avec les grévistes. La direction les renvoie vers Yves de Waroquier, fraîchement arrivé pour gérer la crise. Aucune négociation n'est programmée jeudi et les salariés sont "organisés pour rester tout le week-end s'il le faut", prévient une salariée citée par l'Agence France-Presse.

C'est la troisième séquestration de dirigeants dans la Loire depuis le début de l'année. Quatre cadres du groupe suédois Akers avaient été retenus pendant plus de 24 heures dans leur usine de Fraisses, fin janvier, et deux cadres de Siemens VAI MT avaient été séquestrés à Saint-Chamond début mars.

http://www.lepoint.fr/actualites-economie/2010-03-11/loire-le-dirigeant-de-sullair-europe-sequestre-par-les-salaries/916/0/432363